Tri-tatouée : Athéna (2/3)

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Le problème quand on commence à se faire tatouer, c’est qu’on passe sa vie à imaginer ce que seront nos prochains tatouages. La libellule n’était pas déjà cicatrisée que dans ma tête flottaient déjà des idées pour les gravures indélébiles suivantes. Le temps et l’argent filant à toute allure, ce n’est que trois ans après que j’ai enfin pu concrétiser ces nouveau projets.

Au départ, je voulais un dessin sur l’ensemble du bras droit, un assemblage de symboles et d’images qui me tenaient à cœur. Cela faisait déjà quasiment deux ans que je pensais sérieusement à tous ces symboles, il était temps de passer à l’acte. Sauf que, comme je ne suis pas toujours très futée, je m’y suis prise trop tard, et la tatoueuse avec qui j’aurais voulu travailler ne prenait plus de rendez-vous tellement elle était surbookée. Or, j’avais suffisamment attendu : ce tatouage, je le voulais rapidement. Pas dans un an de plus.

C’est alors qu’un tatoueur parisien dont je suivais quotidiennement la page instagram a annoncé une session de tatouage sur Toulouse. C’est un peu comme lorsqu’on apprend qu’un groupe de rock qu’on ne pensait jamais voir en concert annonce une tournée en France : l’occasion ou jamais de concrétiser une envie qu’on pensait irréalisable. J’étais très fan de ses dessins et de son monde, je me suis lancée. Quelques messages plus tard, mon créneau était réservé pour le 24 avril 2018.

Après m’avoir annoncé qu’il pensait devoir annuler la session puis finalement si, c’est bon, on maintient, j’ai donc rencontré Grenouille à Toulouse dans un appartement non loin de la gare, salon de tatouage sous le nom très mystérieux de La troisième porte, défini comme un « Secret Social Club », à la déco faite de multiples bougies dans des toiles d’araignée et de têtes de poupées, le tout épicé d’un obscur culte de la pizza… Une ambiance donc étrange et particulière, mais pour le coup particulièrement intrigante. Tandis que Grenouille préparait sa table de tatouage, j’ai eu tout le loisir d’observer chaque élément de ce surprenant salon, œuvre d’art 3D.

J’avais passé la matinée à discuter par message avec lui pour finaliser le dessin. Après plusieurs essais pour lesquels je n’étais que moyennement convaincue, il a fini par m’envoyer LE croquis qui a fait battre mon cœur et j’étais plus que jamais impatiente de le voir posé sur ma peau. Mes exigences étaient simples tout en étant pointues : je voulais une chouette chevêche d’Athéna posée sur une branche d’acacia (avec les épines) dont la pointe se terminerait par une plume de stylo.

Encore une référence à l’écriture, donc (au cas où ce ne serait pas assez clair que c’est toute ma vie). Doublée d’une référence à mon nom de plume, Cléa Cassia, dont vous aviez déjà eu l’explication si vous avez lu mon recueil de textes (mais qu’attendez-vous si ce n’est pas déjà fait ?). Quand au pourquoi de la chouette, c’est surtout la référence à Athéna qu’il faut saisir. Dans la mythologie grecque, elle était (notamment) la déesse de l’intelligence. Je l’ai un peu abordé au fil de mes articles de mars, et il s’avère que c’est un thème fondamental pour mon année 2018, un tournant majeur de ma vie, la compréhension de qui je suis et de comment je fonctionne. Il est toujours prévu que je vous en parle un peu plus en détail, mais ça reste un sujet très compliqué à aborder, d’autant que je n’en ai pas officiellement la légitimité. Mais, s’il y a bien une idée qui me colle à la peau pour 2018, c’est celle-là. Il était presque vital pour moi de la faire encrer.

tatouage chouette

La séance de tatouage a été relativement rapide (un peu plus de 2h il me semble) et sans douleur excessive (mais il est vrai que j’ai une bonne tolérance). Grenouille a commencé par me dire qu’il n’était pas le genre de tatoueur à taper la discussion et qu’il s’en excusait par avance ; ça tombait bien puisque, dans le genre bavard, je ne suis pas non plus très brillante (je vous le rappelle pour mémo, parler aux inconnus, ça titille mon angoisse sociale). Nous avons quand même échangé sur quelques sujets, de l’explication de mon tatouage à mon roman en cours d’écriture puis à l’évocation de sa vie sentimentale (je n’aime pas parler aux gens mais parfois j’arrive à faire parler les gens, va comprendre le paradoxe).

Lorsque la dernière goutte d’encre a été gravée sous ma peau, j’ai pu descendre de la table et aller admirer ce nouvel être ailé qui était né sur ma cuisse. J’ai immédiatement été ravie de ce tatouage et de l’allure qu’il donnait à ma cuisse, un peu de caractère, un peu de mouvement, un peu de détermination. Je l’arbore fièrement depuis. C’est comme s’il avait toujours été là.

Bien sûr, je remarque ses défauts avec le temps. Mais je crois que les tatouages ne sont pas faits pour être scrutés à la loupe tous les matins en se levant. Peu importe qu’ils soient imparfaits – n’est-ce pas la nature de toute chose ? Comme je l’ai écrit dans mon premier article, ils sont avant tout des marqueurs de notre vie. Les détails, ils sont en nous. Les finitions sont gravées dans nos entrailles. Les peaufinages sont les cristaux de notre essence.

Je me promène désormais dans la vie avec une petite chouette en suspension, prête à bondir, à l’affût des mots sur sa branche d’acacia.

tatouage chouette 2

11 commentaires

  1. Non, je ne vais pas t’énumérer le trouble que tes choix de tatouages ont créé en moi. Déjà c’est magnifique hein, merci pour ce partage. Athéna, la libellule, la chouette, l’acacia, tout ça fait partie intégrante de ma vie. Merci de symboliser tout cela sur ta peau, je suis touchée par la résonance que ces symboles créent dans ta vie. Ton histoire propre. Tu m’émeus.

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    1. Je suis très émue à mon tour de ton commentaire et de savoir que nos vies partagent ces symboles et cette sensibilité. Nous verrons si cela se confirme pour le troisième… Mais il est encore bien différent des deux autres !
      En tout cas merci à toi pour tes mots si doux. Je suis touchée de chacun d’entre eux

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  2. L’écriture encore et toujours, au coeur de toi et de ta vie.
    Comme je te le disais dans le premier article, j’aime les histoires derrière les tatouages. Une amie me disait que parfois certaines personnes n’aimaient pas raconter les origines / racines de ces dessins. Etrange…

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    1. Je les livre sans problème ici parce que ces tatouages sont vraiment en lien avec moi-même et tout ce que j’écris ici. Mais il est vrai qu’une personne que je ne connaîtrais pas bien et qui me demanderait pourquoi, je n’irai pas m’étendre en détail. Mais c’est aussi parce que c’est une discussion intime et que je ne suis pas à l’aise avec ça 🙂
      Et certains tatouages sont liés à des personnes disparues ou autres cicatrices. Je peux comprendre que ça soit dur d’en parler. Ces tatouages là sont encore plus personnels…

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  3. une fois de plus je suis conquise! les acacias j’adore, j’en ai deux chez moi et la chouette……ah la chouette…..c’est tout un poème!
    quant aux photos, wahhh splendides!!!!! oui tu peux être fière d’arborer ces tatouages, ils sont magnifiques et ils te vont si bien!!! je trépigne déjà d’impatience pour voir le troisième…sur le bras, ai-je cru comprendre?
    gros bisous et bravo pour ces choix-là!

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    1. Ah, je suis contente qu’il te plaise aussi ! Merci pour les photos. L’amie qui les a prises a bien su les mettre en scène. La forêt s’y prêtait si bien !

      Oui le 3e est sur le bras, je suis en train d’écrire l’article. C’est encore quelque chose de différent.
      Gros bisous à toi et merci une fois de plus pour ton enthousiasme.

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